Avis sur la saisine n° 23-010

Adopté en réunion plénière du 11 avril 2023 (version PDF)

Description de la saisine

Le 13 janvier 2023 par lettre recommandée et le 24 janvier en ligne, M. Nicolas Tavernier, agissant au nom de l’Association nationale pour la promotion et l’avenir de la pédagogie Steiner-Waldorf (ANPAPS) en qualité de président, a saisi le CDJM à propos du contenu d’une séquence intitulée « L’Œil du 20 h » diffusée par France 2, dans son journal de 20 heures, le 3 novembre 2022. Elle est également disponible sur le site de la chaîne, sous le titre « La méthode Steiner, une pédagogie alternative sous surveillance ».

Le requérant, qui précise inclure dans sa saisine l’introduction de Mme Anne-Sophie Lapix en ouverture du journal, formule les griefs suivants : inexactitudes, diffusion d’une information ou d’une opinion contribuant à nourrir la haine ou les préjugés, non-rectification d’erreurs.

M. Tavernier relève plusieurs passages qu’il estime être inexacts :

  • lorsque Mme Lapix affirme, en ouverture du journal, que « “L’œil du 20 h” s’intéressera aux écoles Steiner, qui sortent des clous de l’Éducation nationale », « alors que, rapporte-t-il, l’école présentée ensuite n’est pas labellisée Steiner-Waldorf » ;
  • lorsque le reportage sous-entend, à ses yeux, que « les écoles Steiner-Waldorf s’évertuent à former de futurs citoyens qui ne seraient pas aptes à s’insérer dans notre République » alors que, dit-il, « dans plusieurs écoles Steiner-Waldorf labellisées, les élèves participent aux conseils municipaux des jeunes proposés par certaines communes » ;
  • lorsque le commentaire off et l’article en ligne affirment que « rares sont ceux qui racontent les écoles Steiner de l’intérieur », car, écrit-il, « des témoignages “de l’intérieur” sur les écoles Steiner-Waldorf sont loin d’être difficiles à trouver. L’ANPAPS en a recueilli des centaines, souvent faits avec le recul d’une vie » ;
  • lorsque la rédaction de France 2 donne à son public, selon lui, « une information administrative complètement fausse », quand un intervenant, M. Rémy Sirvent, secrétaire général du Comité national d’action laïque (Cnal), dit : « On peut ouvrir une école hors contrat sur simple déclaration » ;
  • enfin, lorsque le reportage laisse « M. Sirvent sous-entendre que dans nos écoles on ne pratique pas l’EPS, les sciences, etc. », ce qui est, dit le requérant « totalement faux ».

M. Tavernier considère, en outre, que cette séquence « contribue à nourrir les préjugés entretenus sur Rudolf Steiner » :

  • d’abord, « lorsque, soi-disant pour parler de Rudolf Steiner, Mme Subra-Gomez utilise des images d’archives d’un autre siècle, en noir et blanc, montrant un groupe d’élèves tournant en rond dans des toges blanches, façon secte du Temple solaire… » ;
  • ensuite, par l’emploi dans son commentaire du mot « scolarisé », à propos d’un enfant accueilli « dans une micro-crèche alternative qui pratique la pédagogie Steiner », alors qu’« un enfant n’est pas “scolarisé” dans une crèche ». ensuite, en « entérin[ant] les conclusions de la Miviludes », lorsqu’il est dit et écrit par la journaliste de France 2 que « l’autorité chargée de surveiller les mouvements sectaires en France vient de publier un rapport qui évoque un “fonctionnement opaque” des écoles Steiner ». Selon lui, on ne peut pas parler de « fonctionnement opaque » des écoles Steiner-Waldorf et la journaliste a validé, sans enquêter, l’opinion de la Miviludes dont il dénonce la méthodologie,
  • enfin, en donnant la parole à M. Grégoire Perra, « principal détracteur de la pédagogie Steiner-Waldorf en France et de l’anthroposophie », qui serait « présentées de manière tronquée » dans le reportage.

Par ailleurs, M. Tavernier estime que France Télévisions manque au « devoir de rectifier rapidement toute information diffusée qui se révèlerait inexacte », alors qu’il a fait part à la rédaction de ses critiques par courriel.

Règles déontologiques concernées

Les textes déontologiques auxquels le CDJM se réfère précisent les obligations du journaliste:

  • Il « tient l’esprit critique, la véracité, l’exactitude, l’intégrité, l’équité, l’impartialité, pour les piliers de l’action journalistique ; tient l’accusation sans preuve, l’intention de nuire, l’altération des documents, la déformation des faits, le détournement d’images, le mensonge, la manipulation, la censure et l’autocensure, la non-vérification des faits, pour les plus graves dérives professionnelles », selon la Charte d’éthique professionnelle des journalistes (SNJ, 1918/1938/2011).
  • Il doit « publier seulement les informations dont l’origine est connue ou les accompagner, si c’est nécessaire, des réserves qui s’imposent », selon la Déclaration des droits et devoirs des journalistes (Munich, 1971, devoir n°3).
  • Il doit « respecter les faits et le droit que le public a de les connaître », selon la Charte d’éthique mondiale des journalistes (FIJ, 2019, article 1).
  • Il « considérera comme fautes professionnelles graves le plagiat, la distorsion des faits, la calomnie, la médisance, la diffamation, les accusations sans fondement », selon l’article 10 de la Charte d’éthique mondiale des journalistes (FIJ, 2019, article 10).
  • Il « dispose d’un droit de suite, qui est aussi un devoir, sur les informations qu’il diffuse et fait en sorte de rectifier rapidement toute information diffusée qui se révèlerait inexacte », selon la Charte d’éthique professionnelle des journalistes (SNJ, 1918/1938/2011).
  • Il « rectifie toute information publiée qui se révèle inexacte », selon la Déclaration des droits et devoirs des journalistes (Munich, 1971, devoir no 6).
  • Il « s’efforcera par tous les moyens de rectifier de manière rapide, explicite, complète et visible toute erreur ou information publiée qui s’avère inexacte », selon la Charte d’éthique mondiale des journalistes (FIJ, 2019, article 6).

Réponse du média mis en cause

Le 27 janvier 2023, le CDJM a adressé à M. Alexandre Kara, directeur de l’information de France Télévisions, avec copie à Mmes Margaux Subra-Gomez, journaliste, Elsa Pallot, rédactrice en chef du 20 heures de France 2 et Anne-Sophie Lapix, journaliste, un courrier les informant de cette saisine et les invitant à faire connaître leurs observations dans un délai de quinze jours, comme le prévoit le règlement du CDJM.

À la date du 11 avril, aucune réponse n’est parvenue au CDJM.

Dans un e-mail daté du 2 décembre 2022, la direction juridique de France 2, pour justifier son refus d’accorder un droit de réponse au requérant, a fait valoir que « le reportage était consacré aux écoles hors contrat en France dont certaines sont affiliées à la Fondation Steiner », qu’« il n’avait pas pour but de présenter un panorama exhaustif des écoles Steiner en France ni d’en dresser un portrait élogieux ou critique, mais de faire état d’interrogations existant sur certains établissements, à partir de témoignages et du rapport rendu par la Miviludes le jour de la diffusion du reportage, dans lequel elle pointe le “fonctionnement opaque” et “une potentielle emprise mentale” au sein de certaines écoles », enfin qu’« à aucun moment, il n’est affirmé que la pédagogie Steiner-Waldorf entraînerait des dérives sectaires ».

Analyse du CDJM

➔ Le 3 novembre 2022, en ouverture du journal de 20 heures de France 2, Mme Anne-Sophie Lapix annonce dans les titres qu’« un rapport pointe la hausse des dérives sectaires en France » et que la séquence « L’Œil du 20 h » ce soir-là « s’intéressera aux écoles Steiner qui sortent des clous de l’Éducation nationale ». La mention « Des écoles hors contrat dans le viseur » apparaît à l’écran.

Puis, au cours du journal, intervient le sujet lui-même. Il débute par un « chapô » d’introduction générale relatif à la hausse des ouvertures d’écoles hors contrat à la rentrée scolaire 2022, des écoles « parfois accusées d’être hors de contrôle », précise la voix off. S’enchaînent alors :

  • un reportage dans une école maternelle de l’île de Ré, « qui s’inspire de la méthode Steiner » ;
  • une explication de cette méthode développée au XXe siècle par Rudolf Steiner, le créateur de l’anthroposophie – un courant ésotérique –, et illustrée par des images d’archives ;
  • le témoignage d’une mère d’un enfant autrefois « scolarisé dans une micro-crèche alternative, qui pratique la pédagogie Steiner » et qui « a constaté des dysfonctionnements » ;
  • la publication d’un rapport de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), « qui évoque un “fonctionnement opaque” des écoles Steiner » et « met en garde les parents sur une “potentielle emprise mentale” » ;
  • le cas d’une école Steiner fermée par le rectorat dans les Pyrénées ;
  • le témoignage d’un ancien professeur d’une école Steiner qui rapporte des stratégies de contournement des inspections de l’Éducation nationale ;
  • une interview du secrétaire général du Comité national d’action laïque (Cnal), qui regrette que l’« on [puisse] ouvrir une école hors contrat sur simple déclaration »,
  • enfin, un démenti de « la Fondation Steiner » relatif aux accusations relayées par le sujet de France 2.

Sur le non-respect de l’exactitude et de la véracité

➔ M. Nicolas Tavernier, président de l’ANPAPS, reproche tout d’abord au journal de France 2 d’avoir commis plusieurs inexactitudes ou sous-entendus conduisant à des erreurs.

Ainsi, en ouverture du journal, le sujet à venir est présenté comme une enquête portant sur « les écoles Steiner », dont la pédagogie est promue par l’association qu’il préside, alors même que le premier reportage consacré au sujet concerne une école maternelle qui n’est pas « labellisée » Steiner. De même, le sujet mentionne à plusieurs reprises une « Fondation Steiner » qui n’existe pas. Enfin, il y est dit que « rares sont ceux qui racontent les écoles Steiner de l’intérieur », alors que, selon M. Tavernier, de tels témoins sont faciles à trouver, à commencer par ceux qui figurent sur le site de son association.

➔ Le CDJM note en premier lieu que, si le titre et l’introduction de « L’œil du 20 h » utilisent la méthode dite de l’entonnoir, partant du général (les écoles hors contrat) pour arriver au cas particulier (les écoles Steiner), le sujet de la séquence mise en cause porte bien sur les controverses liées à la méthode Steiner, et non sur les pédagogies alternatives en général. C’est d’ailleurs ainsi qu’est présenté l’article présentant la séquence en ligne : « La méthode Steiner, une pédagogie alternative sous surveillance ».

Le CDJM considère que le titre utilisé en ouverture du journal de France 2 annonçant une enquête sur « les écoles Steiner » (qui est distinct de celui en ligne) peut prêter à confusion, dans la mesure où l’école maternelle présentée en début de sujet n’est pas une école Steiner stricto sensu – comme il ressort de la lecture de la liste de la Fédération pédagogie Steiner-Waldorf en France, communiquée par le requérant. Il s’agit d’un établissement dont le commentaire off de « L’œil du 20 h » précise qu’il « s’inspire » de la « méthode Steiner », sans rapport avec ladite fédération.

Ensuite, le CDJM constate qu’il n’existe aucune trace d’une « Fondation Steiner », dont la mention est faite à plusieurs reprises dans la séquence (le requérant suggère qu’il s’agit de la Fédération pédagogie Steiner-Waldorf en France). Et il observe que, contrairement à ce qui est dit, il est plutôt facile de trouver des témoignages permettant de raconter « de l’intérieur » les écoles Steiner – ce dont la consultation du site de l’ANPAPS que préside le requérant permet de se convaincre, sauf à démontrer que ces récits personnels, qui ne sont pas anonymes, sont inventés ou manipulés.

Sur ces trois points, le CDJM estime donc que France 2 a enfreint l’obligation déontologique d’exactitude.

➔ En revanche, le CDJM ne peut suivre M. Tavernier lorsqu’il énonce que la chaîne de télévision aurait donné à son public « une information administrative complètement fausse », en laissant le représentant du Cnal indiquer qu’« on peut ouvrir une école hors contrat sur simple déclaration », alors que, selon le requérant, « ladite déclaration appelle une réponse de l’Éducation nationale qui doit valider l’ouverture de l’école ».

L’article L. 441-1 du code de l’éducation dispose, en effet, que « toute personne […] peut ouvrir un établissement d’enseignement scolaire privé à condition d’en déclarer son intention à l’autorité compétente de l’Etat en matière d’éducation, qui transmet la déclaration au maire de la commune dans laquelle l’établissement est situé, au représentant de l’Etat dans le département et au procureur de la République ».

Mais, peut-on aussi constater à la lecture de la suite de cette disposition légale, aucune « validation » à proprement parler ne doit être effectuée par l’Education nationale. Comme on peut le lire également sur le site de l’administration française, il existe certes une « possibilité » pour le recteur, le maire et/ou le préfet de s’opposer à l’ouverture de l’école, dans les trois mois qui suivent la déclaration, si certaines conditions (de nationalité, d’hygiène et de sécurité, atteignant à l’ordre public, etc.) ne sont pas respectées.

Il n’est cependant question d’aucune nécessité d’obtenir une « validation », et a fortiori une validation « pédagogique », par l’Éducation nationale, telle que souhaitée par le représentant du Cnal interrogé par « L’œil du 20 h ». Sans citer particulièrement les écoles Steiner, celui-ci, lors de l’interview, évoque combien il est facile, à ses yeux, d’ouvrir une école hors contrat en France, alors que les pouvoirs publics devraient, selon lui, « s’assurer que les élèves pourront par exemple avoir accès au numérique, faire du sport, des expériences en sciences, etc. ».

Le CDJM considère que le grief d’inexactitude n’est donc pas ici fondé.

Sur le manque d’équité et la non vérification des faits

➔ Ensuite, le requérant accuse globalement « L’œil du 20 h » d’avoir voulu donner une mauvaise image de la pédagogie Steiner-Waldorf et considère que cette séquence « contribue à nourrir les préjugés entretenus sur Rudolf Steiner ». Il y décèle même une « une volonté de nuire et de stigmatiser la pédagogie Steiner-Waldorf », par exemple, « lorsque, soi-disant pour parler de Rudolf Steiner, [la journaliste de France 2] utilise des images d’archives d’un autre siècle, en noir et blanc, montrant un groupe d’élèves tournant en rond dans des toges blanches, façon secte du Temple solaire… ».

Il formule le même grief lorsqu’elle emploie dans son commentaire le mot « scolarisé » à propos d’un enfant accueilli « dans une micro-crèche alternative qui pratique la pédagogie Steiner », alors qu’« un enfant n’est pas “scolarisé” dans une crèche ». Selon lui, l’emploi de ce mot permet à la journaliste de France 2 « d’attaquer la pédagogie Steiner-Waldorf » en « parl[ant] de scolarité pour mettre en cause un mouvement pédagogique conformément à ses préjugés discriminatoires ») ;

Même problème, selon le requérant, quand le sujet donne la parole à M. Grégoire Perra, « principal détracteur de la pédagogie Steiner-Waldorf en France et de l’anthroposophie », qui serait « présentées de manière tronquée » dans le reportage.

M. Tavernier nourrit aussi son grief de l’utilisation qui est faite par « L’œil du 20 h » des conclusions de la Miviludes, qui évoque dans son rapport un « fonctionnement opaque » des écoles Steiner. Selon lui, on ne peut pas parler de « fonctionnement opaque » des écoles Steiner-Waldorf, car « l’ensemble des informations factuelles est publié sur le site Internet de la Fédération des écoles Steiner-Waldorf, depuis l’origine de la pédagogie jusqu’à son application pratique dans les écoles ». Il considère que la journaliste a validé l’opinion de la Miviludes, dont il dénonce la méthodologie, sans enquêter.

Il estime enfin que France 2 sous-entend que « les écoles Steiner-Waldorf s’évertuent à former de futurs citoyens qui ne seraient pas aptes à s’insérer dans notre République », alors que, dit-il, « dans plusieurs écoles Steiner-Waldorf labellisées, les élèves participent aux conseils municipaux des jeunes proposés par certaines communes ». Et il considère que le reportage laisse le secrétaire général du Cnal « sous-entendre que dans [les écoles Steiner], on ne pratique pas l’EPS, les sciences, etc. », ce qui est, affirme M. Tavernier, « totalement faux ».

➔ Le CDJM note tout d’abord qu’il est difficile d’extrapoler les sous-entendus généraux perçus par le requérant à partir des deux derniers témoignages cités. Si la directrice de la maternelle de l’île de Ré interrogée dans le reportage fait part de son expérience et de sa conviction que « rentrer dans l’écriture, apprendre à compter jusqu’à 30, les valeurs de la République… pour [elle], ce n’est pas forcément quelque chose qui est nécessaire à cet âge-là », elle ne dit rien, pas plus que l’enquête de France 2 d’ailleurs, sur la capacité des écoles Steiner à former tout au long de la scolarité des élèves de futurs citoyens.

De même, lorsque le secrétaire général du Cnal évoque la facilité, à ses yeux, d’ouvrir une école hors contrat, alors que les pouvoirs publics devraient, selon lui et comme il a déjà été analysé précédemment, « s’assurer que les élèves pourront par exemple avoir accès au numérique, faire du sport, des expériences en sciences etc. », celui-ci ne ne dit rien qui cible spécifiquement les écoles Steiner sur les points qu’il énumère. Son propos concerne la facilité d’ouvrir une école hors contrat en France – même si le CDJM entend bien que l’insertion de son témoignage dans une enquête exclusivement centrée sur la « méthode Steiner », faute de précisions dans le commentaire off, peut éventuellement prêter à confusion.

Le CDJM estime, par ailleurs, que l’usage du verbe « scolariser » est certes inapproprié pour un enfant accueilli dans une école maternelle, mais qu’il n’est pas pour autant possible de conclure que cette inexactitude est substantielle et de nature à déformer la compréhension. Il constate, de même, que la présentation de M. Grégoire Perra – « ancien professeur dans une école Steiner » selon l’incrustation à l’écran, qui « y a enseigné plusieurs années » selon la précision du commentaire off –, n’est pas particulièrement tronquée et qu’aucune information substantielle et vérifiée, entrant directement dans le cadre du sujet abordé par France 2, ne vient déformer la compréhension de son témoignage à charge contre les écoles Steiner.

Le CDJM considère, par ailleurs, que la journaliste de « L’œil du 20 h » n’a pas enfreint de règle déontologique particulière en rapportant les conclusions de la Miviludes, qui dénoncent un « fonctionnement opaque » des écoles Steiner. Il remarque qu’il aurait même pu lui être reproché de ne pas l’avoir cité si elle ne l’avait pas fait.

En revanche, le CDJM constate que le reportage donne peu la parole aux défenseurs de la méthode Steiner. Le sujet montre bien des bribes de communiqués repris d’un site Internet qui n’est pas clairement identifié – il semble être celui de la Fédération pédagogie Steiner-Waldorf en France, sans que l’on puisse en être sûr. Mais il ne fait pas parler l’un de ses représentants (sauf si ceux-ci ont refusé de parler, ce que ne dit pas « L’œil du 20 h »). Ce n’est pas suffisant : une simple phrase donnée à une quinzaine de secondes de la fin de la séquence en cause, alors que deux témoignages, notamment, ont évoqué dans la longueur leur opposition à la méthode ne peut suffire au respect de l’offre de réplique, équilibre essentiel à la pratique journalistique.

Dans le même sens, le CDJM observe que, pour illustrer ce qu’est la pédagogie Steiner, « L’œil du 20 h » a fait le choix non pas de diffuser des images contemporaines, mais d’insérer des images d’archives noir et blanc d’enfants tournant en rond dans des toges blanches. Cet extrait n’est pas identifié ni présenté comme une image d’archives, avec une mention explicite à l’écran. Il a pour effet de jeter le trouble sur la nature actuelle de l’enseignement qui est dispensé dans ces établissements.

Le CDJM estime que les règles déontologiques d’équité et de vérification des faits n’ont pas été respectées.

Sur la non-rectification des erreurs

➔ Enfin, M. Tavernier rapporte qu’il s’est rapproché de France 2 pour obtenir rectification des erreurs diffusées, ce qui lui a été refusé. Il joint à sa saisine la copie d’un échange qu’il a eu avec les services de France Télévisions.

Le CDJM constate qu’aucune rectification d’erreur n’a été apportée au texte en ligne qui accompagne la vidéo de la séquence en cause et que France 2 a donc enfreint l’obligation déontologique de rectification des inexactitudes et des atteintes à la véracité des faits.

Conclusion

Le CDJM, réuni le 11 avril 2023 en séance plénière, estime que, si France 2 a respecté l’obligation déontologique d’exactitude sur plusieurs points ciblés par la saisine, le média a cependant enfreint cette règle sur trois points précis, ainsi que les obligations d’équité et de vérification des faits. Il n’a pas non plus respecté l’obligation déontologique de rectification des erreurs.

La saisine est déclarée partiellement fondée.

Cette décision a été prise par consensus.

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